Les femmes dans les conseils : le plafond de verre est-il encore solide ?
Cela fait maintenant des années que le mot « diversité » est sur toutes les lèvres et que le sujet occupe une place de plus en plus omniprésente dans les mouvements sociaux, mais est aussi à l’ordre du jour des conseils d’administration comme priorité sur le long-terme. Après l’instauration de quotas, notamment en Europe, ayant pour but d’accentuer le nombre de femmes dans les conseils, les chiffres tendent à prouver un constat mitigé : la diversité augmente mais la parité au sein des conseils est loin d’être atteinte.
Les conseils d’administration paritaires sont loin d’être monnaie courante dans le monde des affaires. Néanmoins, un rendement supérieur de plus de 10 % est constaté pour les organisations qui comptent une ou plusieurs femmes dans leurs salles de conseils. Malgré des mesures strictes mises en place, les femmes peinent toujours à briser ce fameux « plafond de verre ».
La culture des boys clubs : frein à la diversité
L’augmentation de la représentation des femmes dans les conseils d’administration peut être influencée par les actions mises en place comme les quotas, mais cela reste insuffisant pour embrasser pleinement ce mouvement. Les pays européens ont déjà emboité le pas. En tête, on trouve la Norvège où le pourcentage de femmes dans les conseils d’administration de grandes sociétés atteint les 42%. Suivent plus loin derrière ses voisins, la Finlande et la Suède, où ce pourcentage atteint respectivement 27% et 25%. La France se rapproche de plus en plus du trio de tête avec notamment 22,5% de femmes au sein des conseils.
Les États-Unis et le Canada sont encore très loin de leurs amis européens avec respectivement 16,1% et 14,5%. Mais pourquoi une telle différence ? Plusieurs constats mettent en avant que les principaux obstacles à la présence des femmes dans les conseils sont les préjugés, les relations fortes au sein du cercle des vieux copains et la difficile articulation du travail et de la famille.
Malgré les efforts consentis, le nombre de femmes dans les conseils reste bien en deçà de ce qui est préconisé et souhaité. Comme mentionné dans l’article « La culture du boys club toujours bien ancrée en entreprise », beaucoup de conseils d’administration sont encore à consonance masculine et ce type de conseil reste encore frileux à l’idée d’accueillir des femmes à leur table de réunion car la plupart ne souhaite pas changer la dynamique trop rapidement.
Selon une étude réalisée par Yaron Nili, professeur assistant en Droit à l’Université du Wisconsin, intitulée « Beyond the Numbers: Substantive Gender Diversity in Boardrooms », les femmes promues à des postes stratégiques et ayant obtenu un siège sur les conseils de grandes organisations américaines n’ont en fait que très peu de marge de manœuvre en termes de leadership et peu de poids dans les décisions une fois qu’elles ont intégrées la salle de conseil.
Enfin des actions payantes ?
Depuis peu aux États-Unis, la pression auprès des organisations se fait de plus en plus forte avec notamment des campagnes ciblées, comme par exemple celle réalisée par State Street Global Advisors, une société de placement, qui a installé la désormais célèbre « Fearless Girl ». Cette statue en bronze fait face au taureau de Wall Street pour sensibiliser les entreprises et faire prendre conscience des différences de traitement entre les hommes et les femmes qui subsistent encore et encourager le recrutement de femmes aux postes stratégiques.
Comme le mentionne l’article « De gros investisseurs s’attaquent au manque de femmes à la direction d’entreprises », le monde financier a décidé de passer à l’action avec notamment le choix de grands groupes d’investissement mondiaux tels que BlackRock Inc. aux États-Unis, Hermes, Legal & General Investment Management ou encore Standard Life Aberdeen Plc basés au Royaume-Uni, de voter contre les CA où les femmes sont sous-représentées. Le Canada risque d’être la prochaine cible d’ailleurs.
Ces actions drastiques sont mises en place pour alerter une nouvelle fois les dirigeants des grandes organisations dans le monde : la féminisation de leurs conseils est encore trop lente vis-à-vis de la pression sociale exercée depuis maintenant de nombreuses années. Augmenter la diversité est un objectif, atteindre la parité en est un autre. Atteindre ce deuxième objectif passe avant-tout par l’augmentation de la diversité au sein des CA.
Références :
TVA Nouvelles – 2 avril 2018 – « La culture du boys club toujours bien ancrée en entreprise »
Journal de Montréal – 19 avril 2018 – « De gros investisseurs s’attaquent au manque de femmes à la direction d’entreprises »
Bloomberg – 19 avril 2018 – « Big Investors Push Harder for More Women Directors »
Ethical Boardroom – 3 avril 2018 – « Opening Boardroom doors to women »
publié le 27/04/2018